Maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) : VIH et antirétroviraux

30 novembre 2020 | Q&R

Les personnes vivant avec le VIH qui ne suivent pas de traitement antirétroviral (TAR) et qui présentent une faible numération de CD4, en particulier celles chez qui la maladie à VIH est à un stade avancé, courent un risque plus élevé d’infections opportunistes et de complications liées au sida. Cependant, les données disponibles sur le risque éventuellement accru d’infection par le SARS-CoV-2 et/ou de complications cliniques liées à la COVID-19 chez les personnes vivant avec le VIH par rapport à la population générale évoluent et sont contradictoires.

La prévalence des facteurs de risques connus d’infection par le virus de la COVID-19 et de complications associées, tels que les cardiopathies, les maladies rénales, le diabète, les pneumopathies chroniques, l’obésité, ainsi que d’autres comorbidités et co-infections, comme la tuberculose, peut être plus élevée chez les personnes vivant avec le VIH.

Plusieurs études de cas et de cohortes de tailles restreintes de personnes vivant avec le VIH hospitalisées positives pour la COVID-19 montrent des résultats cliniques et un risque d’infection par le SARS-CoV-2 comparables à ceux de la population générale, en particulier chez les patients dont l’infection à VIH est bien contrôlée (sous TAR, avec une numération des CD4 > 200 cellules/mm3 et une charge virale supprimée). Ces données cliniques limitées semblent indiquer que le risque de mortalité chez les personnes vivant avec le VIH est associé à des facteurs de risques connus pour la COVID-19 comme l’âge avancé et la présence de comorbidités, notamment les maladies cardiovasculaires, le diabète, les maladies respiratoires chroniques et l’obésité (1-3).

Plusieurs revues systématiques et non systématiques ont évalué les conséquences de la COVID-19 chez les personnes vivant avec le VIH ; la plupart font état de résultats comparables en termes de mortalité et de morbidité par rapport aux patients séronégatifs pour le VIH (4-8). Les méthodes utilisées n’ont pas toujours évalué les résultats en fonction des facteurs de risque connus de la COVID-19 (4). En outre, les données relatives aux patients qui présentent une infection à VIH à un stade avancé (faible numération de CD4) sont limitées. 

Une revue systématique, diffusée essentiellement sous forme de prépublication, a montré que parmi 144 795 patients atteints de COVID-19 hospitalisés en Amérique du Nord, en Europe et en Asie, la prévalence globale du VIH était de 1,22 % (IC à 95 % : [0,61 % ; 2,43 %]), soit un taux deux fois supérieur à la prévalence globale du VIH localement observée dans la population générale qui s’établit à 0,65 % (IC à 95 % : [0,48 % ; 0,89 %]), ce qui semble indiquer une sensibilité potentielle chez les personnes vivant avec le VIH (9). 

Des données supplémentaires sur ce sujet, issues de plusieurs études de cohorte menées en Afrique du Sud, aux États-Unis d’Amérique et au Royaume-Uni (10-12), font état d’une élévation modérée du risque de décès directement attribuable à l’infection à VIH après ajustement en fonction de l’âge, du sexe, de l’appartenance ethnique et de la présence de comorbidités ; une méta-analyse non publiée incluant ces études a montré que le risque de décès était près de deux fois supérieur à celui des patients séronégatifs pour le VIH ; cependant, un facteur de confusion lié aux comorbidités associées à un risque accru de développer une forme grave de COVID-19 n’est pas exclus (13).

Il est essentiel de protéger les personnes vivant avec le VIH pendant la pandémie de COVID-19 et de s’assurer qu’elles peuvent poursuivre leur traitement. Les chercheurs étudient actuellement la question de savoir si les personnes vivant avec le VIH infectées par le virus de la COVID-19 présentent un risque plus élevé d’issue défavorable. Les données préliminaires sur une vulnérabilité modérément accrue des personnes vivant avec le VIH viennent renforcer l’urgence de garantir à ces personnes l’accès à des antirétroviraux et à des traitements contre les comorbidités – comme le traitement de l’hypertension, des maladies cardiovasculaires, des pneumopathies chroniques, du diabète, de la tuberculose et du maintien d’un poids de forme. 

Un ensemble plus vaste de données représentatives d’une zone géographique plus étendue est nécessaire pour mieux comprendre comment la co-infection par le SARS-CoV-2 et le VIH influe sur la gravité de la maladie, sa progression et l’issue de l’hospitalisation pour COVID-19. À cette fin, l’OMS a mis en place une plateforme mondiale de données cliniques sur la COVID-19. Au 4 novembre 2020, l’OMS avait reçu des données cliniques de plus de 30 pays à travers le monde sur 79 000 patients hospitalisés avec une COVID-19 confirmée ou suspectée, dont 5291 personnes vivant avec le VIH. Cette plateforme est ouverte à tous les États Membres et à tous les établissements de santé pour qu’ils fournissent des données ; l’inclusion de ces données contribuera à éclairer les futures orientations sur la meilleure façon de protéger les personnes vivant avec le VIH pendant la pandémie de COVID-19.

Il est conseillé aux personnes vivant avec le VIH de prendre les mêmes précautions contre la COVID-19 que celles recommandées pour la population générale (14-15): se laver souvent les mains ; respecter les règles d’hygiène en cas de toux ; maintenir une distanciation physique ; porter un masque quand c’est approprié et conformément à la réglementation locale ; consulter un médecin en cas de symptômes ; s’isoler en cas d’apparition de symptômes ou de contact avec un cas positif pour la COVID-19 ; et suivre les autres prescriptions des pouvoirs publics, aux niveaux local et national. 

Il est important de veiller à ce que les personnes vivant avec le VIH aient accès aux antirétroviraux sur de plus longues périodes (approvisionnement de 3 à 6 mois) et que les programmes délivrent plusieurs mois d’antirétroviraux, ainsi que d’autres médicaments nécessaires, tels que le traitement de substitution aux opioïdes, le traitement préventif de la tuberculose et les traitements contre les comorbidités. Il faut également s’assurer que certaines vaccinations (antigrippale et antipneumococcique) sont à jour et que ces personnes ont accès à un approvisionnement suffisant en médicaments pour traiter ou prévenir les co-infections et des comorbidités.

Les antirétroviraux ont initialement été envisagés pour le traitement de la COVID-19 sur la base de criblage virtuel et d’études in vitro. Il ressort des données publiées que la plupart des patients infectés par le virus à l’origine de la COVID-19 ont des symptômes légers à modérés, ont de bons résultats cliniques et n’ont pas besoin d’être hospitalisés. Dans certains cas, les patients admis à l’hôpital ont reçu un médicament antirétroviral, la plupart du temps, l’association lopinavir/ritonavir (LPV/r) ou, plus rarement, l’association darunavir/ritonavir (DRV/r). Les études sur l’utilité que les traitements antirétroviraux pourraient présenter face à la COVID-19 ont principalement été menées sur des personnes négatives pour le VIH. 

Un examen systématique sur le recours aux antirétroviraux pour des patients infectés par le coronavirus, conduit en mars 2020, a recensé 2 essais randomisés et 21 études d’observation fournissant des données sur les résultats cliniques de l’utilisation de LPV/r pour le traitement de la COVID-19, du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) [16]. Les essais randomisés n’ont pas montré d’avantage clinique, les études d’observation n’ont pas été concluantes et le degré de certitude de l’ensemble de données probantes concernant les résultats importants était faible voire très faible. Un examen systématique actualisé en continu et une méta-analyse réalisée dans le cadre d’un réseau concernant l’efficacité et l’innocuité des traitements médicamenteux contre la COVID-19 publiés en septembre 2020 n’ont pas trouvé d’éléments convaincants qui démontreraient que les traitements antirétroviraux tels que le lopinavir/ritonavir réduiraient la mortalité ou augmenteraient la clairance virale [17].

Plus récemment, deux autres études randomisées ont confirmé ces conclusions et n’ont pas préconisé l’utilisation de LPV/r pour le traitement des patients hospitalisés pour une infection par le SARS-CoV-2. 

Un essai clinique publié récemment a indiqué que chez les patients COVID-19 admis à l’hôpital, le LPV/r n’était pas responsable de réductions de la mortalité, de la durée de l’hospitalisation ou du risque que le patient ait besoin de ventilation mécanique invasive ou succombe à la maladie [18]. De même, selon l’essai Solidarity coordonné par l’OMS et publié dernièrement, le LPV/r semble avoir peu ou pas d’effet sur les patients atteints de la COVID-19 et hospitalisés, si l’on se réfère à la mortalité globale, à la mise en route de la ventilation et à la durée du séjour à l’hôpital [19]. 

Selon les données disponibles, l’utilisation de LPV/r et d’autres antirétroviraux n’est pas susceptible d’améliorer les résultats cliniques des malades de la COVID-19 qui ont eu besoin d’être hospitalisés. 

Plusieurs études randomisées et non randomisées ont évalué si les médicaments contre l’hépatite C pouvaient être utilisés pour le traitement du SARS-CoV-2 et bien que les résultats provisoires semblent indiquer qu’ils présentent un avantage en termes de guérison clinique, les données sont insuffisantes (échantillon de petite taille, utilisation d’une étude non randomisée) pour que ces antirétroviraux puissent être recommandés pour lutter contre le SARS-CoV-2 [20]. 

Plusieurs études sur de petits échantillons ont évalué si les antirétroviraux pouvaient être utilisés pour prévenir l’infection par le SARS-CoV-2, et ont souvent abouti à des résultats contradictoires. 

D’après une étude récente, les personnes vivant avec le VIH qui prennent du fumarate de ténofovir disoproxil seraient moins susceptibles de contracter le SARS-CoV-2. Cependant, d’autres études indiquent que la prophylaxie avant l’exposition au VIH à base de ténofovir ne confère pas de protection contre l’infection par le nouveau coronavirus et n’a pas non plus d’incidence positive sur l’évolution de la maladie à coronavirus 2019 [21]. Dans ce cas, la prévalence de l’infection au SARS-CoV-2 était en fait plus élevée chez les personnes qui prenaient une prophylaxie avant l’exposition que chez celles qui n’en prenaient pas. 

Globalement, la littérature disponible n’apporte pas d’éléments concluants indiquant que les antirétroviraux pourraient protéger les personnes contre l’infection par le SARS-CoV-2 ou le risque de développer une forme grave de la maladie. Cependant, le degré de fiabilité des données est très faible compte tenu de la petite taille de l’échantillon et des incertitudes entourant l’intensité de l’exposition. 

Les personnes qui prennent une prophylaxie à titre préventif ou des antirétroviraux dans le but de se protéger de la COVID-19 doivent adopter les mêmes mesures de prévention contre la COVID-19 que celles recommandées à la population générale.

L’OMS ne recommande pas pour l’instant d’utiliser les antirétroviraux comme traitement ou mesure de prévention contre la COVID-19, en dehors du cadre des essais cliniques. À l’heure actuelle, la littérature publiée sur les antirétroviraux se constitue essentiellement d’observations, avec peu d’essais cliniques, et elle ne fournit pas de données de qualité et fondées sur des bases factuelles attestant du bien fondé de leur utilisation à ces fins. L’ensemble de données probantes actuellement disponible n’indique pas que l’utilité du recours au lopinavir/ritonavir (LPV/r) et à d’autres antirétroviraux réduit le risque d’infection par le nouveau coronavirus ou améliore l’évolution clinique pour les formes symptomatiques de la maladie chez les patients atteints de la COVID-19. 

Plus récemment, deux autres études randomisées ont confirmé ces conclusions et n’ont pas préconisé l’utilisation de LPV/r pour le traitement des patients hospitalisés pour une infection par le SARS-CoV-2. L’essai Recovery a montré que la prise de LPV/r ne s’accompagnait pas d’une réduction de la mortalité, du temps d’hospitalisation ou du risque que la maladie progresse au stade où la ventilation mécanique invasive est nécessaire ou celui du décès. [18] Les résultats provisoires de l’essai modulable international coordonné par l’OMS (essai Solidarity) ont également indiqué que le LPV/r avait peu ou pas d’effet sur la mortalité globale, la mise en route de la ventilation et la durée du séjour à l’hôpital chez les personnes hospitalisées atteintes de la COVID-19 [19].

Alors que, partout dans le monde, les pays renforcent leur action de santé publique face à la pandémie de COVID-19, les pays sont instamment appelés à prendre des mesures résolues pour endiguer l’épidémie. L’OMS exhorte tous les pays à trouver l’équilibre qui convient entre la protection de la santé, la prévention des perturbations économiques et sociales et le respect des droits humains. 

L’OMS collabore avec ses partenaires, notamment l’ONUSIDA et le Réseau mondial des personnes vivant avec le VIH pour empêcher une dégradation des droits humains lors de la riposte à la COVID-19 et pour garantir que les personnes qui vivent avec le VIH ou en subissent les conséquences aient autant accès aux services que les autres et que les services liés au VIH continuent d’être assurés sans être perturbés. 

Afin d’empêcher que la COVID-19 se propage dans les prisons et de réduire la morbidité et la mortalité chez les personnes qui sont emprisonnées ou vivent dans d’autres milieux clos, il est indispensable que les prisons et les centres de détention d’immigrants soient pris en compte dans l’action de santé publique globale. Pour cela, les ministères de la santé et de la justice doivent collaborer étroitement et des protocoles doivent être mis en place concernant le dépistage à l’entrée, les mesures de protection personnelle, la distanciation physique, le nettoyage et la désinfection du milieu et les restrictions de déplacements, notamment la limitation des transferts et de l’accès des personnels non essentiels et des visiteurs. Dans le contexte actuel, les pays doivent absolument élaborer des stratégies tendant à éviter le recours à la privation de liberté, afin d’empêcher la surpopulation en milieu clos [22]. Cette approche sera sans doute plus facile à adopter si c’est le ministère de la santé, et non le ministère de la justice ou un ministère apparenté, qui gère les questions touchant à la santé en milieu clos [23].  

La continuité d’accès aux services essentiels de prévention, de dépistage et de traitement du VIH doit être assurée, notamment dans les contextes où des mesures de confinement sont prises dans le cadre de l’action de santé publique face à la pandémie de COVID-19. Il faut envisager et mettre en œuvre des mesures adaptées, reposant sur des bases factuelles, afin de réduire les possibilités de transmission, notamment [24] :

  • L’application des précautions standard pour l’ensemble des patients (en veillant à ce que, quand ils toussent ou éternuent, tous les patients se couvrent le nez et la bouche avec un mouchoir ou utilisent le creux de leur coude ; en distribuant des masques médicaux aux patients présumés infectés par le virus de la COVID-19 qui attendent d’être pris en charge ; en respectant les règles d’hygiène des mains, etc.).
  • Les agents de santé et les relais communautaires, ainsi que les éducateurs et les personnes qui bénéficient de leurs services, doivent adopter des règles d’hygiène des mains et autres mesures de protection.
  • Des mesures de triage, de détection précoce et de contrôle de la source infectieuse (isolement des patients présumés infectés par la COVID-19) doivent être prises.
  • Tout l’établissement de soins doit être correctement ventilé.
  • Idéalement, dans tous les services, une distance d’un à deux mètres doit être maintenue avec les patients, quels qu’ils soient.
  • Les procédures de nettoyage et de désinfection doivent être systématiquement et correctement appliquées.
  • Les médicaments (contre le VIH, la tuberculose et d’autres affections chroniques telles que la dépendance aux opioïdes) doivent être délivrés pour de plus longues périodes afin de réduire la fréquence des visites.
  • Une limite de l’offre aux services de traitement et de prévention essentiels (les séances de conseil peuvent être réduites ou adaptées) peut être envisagée.
  • De nombreux pays ont mis en place des moyens virtuels de fournir des services et d’apporter un soutien aux personnes afin de réduire la fréquentation des centres de consultation.
  • Les pays ont également proposé davantage d’options d’auto-prise en charge, pour l’autotest du VIH par exemple, généralement associées à du soutien à distance pour que les services continuent à être fournis.  
  • Il existe maints exemples d’innovations utilisées pour le maintien des services de prophylaxie préexposition, y compris le soutien virtuel, la distribution de proximité et à domicile et l’utilisation d’autotests de dépistage du VIH, permettant d’assurer le suivi pendant les périodes où les soins cliniques sont suspendus. Les enseignements qui en auront été tirés pourront orienter la mise en œuvre future dans l’après COVID-19.   

Généralement, les populations vulnérables, notamment les membres des populations clés (hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, travailleurs du sexe, consommateurs de drogue, personnes transgenres et personnes incarcérées) ainsi que les sans-abri et les personnes déplacées, risquent davantage d’être infectées, en raison de l’impact des comorbidités sur leur système immunitaire, des difficultés qu’elles rencontrent à appliquer les mesures de confinement et de distanciation physique, et de leur accès généralement limité aux services de santé. Il est essentiel que les services destinés à ces populations (par exemple, services communautaires et de proximité ou centres d’accueil) puissent continuer d’assurer la prévention (distribution de préservatifs, de prophylaxie préexposition, d’aiguilles ou de seringues), le dépistage et le traitement, des activités susceptibles de leur sauver la vie face au VIH, tout en protégeant la sécurité du personnel et des clients. Ces services peuvent être adaptés à la lumière des considérations ci-dessus, le cas échéant. Certains services de prévention, tels que la circoncision masculine médicale volontaire, qui nécessitent de se rendre dans un centre, ont initialement été suspendus dans les premières phases de la riposte à la pandémie de COVID-19. Suite à une évaluation de la situation de la COVID-19, certains pays ont ajusté leurs mesures et recommencent à fournir des services de circoncision masculine médicale volontaire assortis de mesures supplémentaires de prévention contre la COVID-19. 

Toutes les personnes vivant avec le VIH qui répondent bien au traitement antirétroviral auront avantage à utiliser des modèles de thérapie antirétrovirale simplifiés prévoyant une prescription et une délivrance pour plusieurs mois (3 à 6 mois). Ces modèles réduiront la fréquence des visites en cadre clinique et permettraient d’assurer la continuité du traitement si les déplacements entravés pendant l’épidémie de coronavirus. De même, les sujets cliniquement stables ayant un traitement de substitution à la méthadone ou à la buprénorphine devraient avoir plus souvent la possibilité de suivre leur traitement à domicile, afin de réduire la pression sur le secteur de la santé. De nombreux pays ont désormais mis en place la dispensation de doses à prendre à la maison pour les patients stables qui suivent un traitement de substitution aux opioïdes conformément aux recommandations de l’OMS [25]. 

Comme c’est déjà l’usage, des prescriptions pour plusieurs mois peuvent être délivrées à des utilisateurs qui ont déjà été traités par prophylaxie préexposition, en fonction des orientations au niveau national qui peuvent inclure le dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST). Les personnes qui commencent la prophylaxie préexposition devraient revenir après un mois pour un dépistage du VIH et une visite clinique de suivi avant de bénéficier de prescriptions pour plusieurs mois. L’objectif est d’éviter une infection à VIH aiguë, d’évaluer les effets secondaires et de faire un point sur l’intention de poursuivre la prophylaxie préexposition. Cependant, pour cette visite de suivi un mois après le début du traitement, il est envisageable de faire preuve de flexibilité pour les clients motivés qui n’ont pas été potentiellement exposés au VIH récemment (au cours des trois dernières semaines). Ces décisions pourront être prises au cas par cas par les fournisseurs et les clients qui ont recours à la prophylaxie préexposition pour la première fois. Un suivi par télésanté et une délivrance communautaire peuvent être envisagés pour le suivi post-thérapeutique. Un autotest du VIH de qualité peut être envisagé pour le maintien du traitement.

Peu de données sont disponibles sur la présentation clinique de la COVID-19 dans certaines populations, comme les enfants, les femmes enceintes et allaitantes [26], mais les résultats d’une étude de petite taille publiée tendent à indiquer qu’il n’y a aujourd’hui aucune preuve d’infection intra-utérine par transmission verticale chez les femmes qui développent une pneumonie COVID-19 en fin de grossesse, les données ne sont pas non plus suffisantes pour conclure à une transmission verticale par l’allaitement au sein [27]. Même si aucune transmission verticale n’a été documentée, la transmission après la naissance par contact avec des sécrétions respiratoires infectieuses est un motif d’inquiétude. Les nourrissons dont la mère est un cas suspect, probable ou confirmé de COVID-19 doivent être nourris suivant les orientations standard sur l’alimentation du nourrisson [28], tout en appliquant les précautions nécessaires de lutte anti-infectieuse. Comme tous les cas confirmés ou suspects de COVID-19, les mères symptomatiques qui allaitent, pratiquent le peau-à-peau ou appliquent la méthode « mère kangourou » doivent respecter les règles d’hygiène respiratoire, y compris pendant qu’elles nourrissent leur enfant (notamment, si elles ont des symptômes respiratoires, en portant un masque médical quand elles sont à proximité de l’enfant), se laver les mains avant et après tout contact avec l’enfant, et nettoyer et désinfecter systématiquement les surfaces avec lesquelles elles ont été en contact [29].   

Il n’y a actuellement aucune différence bien établie entre les manifestations cliniques de la COVID-19 ou le risque de maladie grave (ou de danger grave pour le fœtus) chez les femmes enceintes et les femmes non enceintes ou chez les adultes en âge de procréer. Cependant, il ressort d’une étude récente sur une large base de données conduite par les Centers for Disease Control and Prevention des États Unis que les femmes enceintes atteintes de la COVID-19 sont plus susceptibles de nécessiter une admission en soins intensifs en raison d’un risque relatif accru de développer une maladie grave [30]. Les femmes enceintes chez qui la COVID-19 est présumée ou confirmée doivent bénéficier de soins d’accompagnement ou de prise en charge, en tenant compte des adaptations immunologiques et physiologiques pendant et après la grossesse, qui pourraient se recouper avec les symptômes de la COVID-19. Les données sont limitées mais, tant que les connaissances disponibles n’apporteront pas d’informations plus claires, une attention particulière devra être accordée aux femmes enceintes présentant d’autres affections et susceptibles d’avoir été infectées par la COVID-19. Aucun décès n’a été rapporté chez les femmes enceintes au moment de la publication de ces informations [31]. Cependant, un dépistage de la COVID-19 devrait peut-être être effectué en priorité chez les femmes enceintes symptomatiques afin de leur donner accès aux soins spécialisés. Toutes les femmes ayant été enceintes récemment qui sont atteintes de la COVID-19 ou ont guéri de cette maladie doivent bénéficier d’informations et de conseils sur l’alimentation en toute sécurité du nourrisson et sur les mesures de lutte anti-infectieuse pour prévenir la transmission du virus de la COVID-19 [32].

En cas de maladie confirmée et pour les sujets sous investigation, la prise en charge est la même que pour les femmes non enceintes, avec un isolement approprié. Les services d’obstétrique doivent être avertis et se préparer, sachant que chaque nouveau-né dont la mère est un cas confirmé de COVID-19 doit être considéré comme une « personne sous investigation » devant être isolée suivant les orientations sur la lutte anti-infectieuse. Actuellement, on ne sait pas si les nouveau-nés atteints de COVID-19 présentent un risque accru de complications sévères.

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[30] Centres for Disease Control. Interim Considerations for Infection Prevention and Control of Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) in Inpatient Obstetric Healthcare Settings, 6 April 2020 (available at : https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/hcp/inpatient-obstetric-healthcare-guidance.html).

[31] Royal College of Obstetricians and Gynaecologists. Corona virus (COVID - 19) infection in Pregnancy. Information for healthcare professionals Version 12, 14 October 2020. (disponible à l’adresse : https://www.rcog.org.uk/coronavirus-pregnancy).

[32] Prise en charge des femmes atteintes de COVID-19 pendant et après la grossesse, Prise en charge clinique de la COVID-19 : Orientations provisoires, Organisation mondiale de la Santé, 27 mai 2020. (disponible à l’adresse : https://apps.who.int/iris/handle/10665/332437)